Une Europe « inclusive et ferme ta gueule »
par H16
Et subitement, la situation devient pénible, notamment pour certains progressistes enragés, qui doivent vivre avec leurs contradictions de plus en plus évidentes entre ce qu’ils prônent (surtout pour les autres) et ce qu’ils pratiquent (éventuellement avec l’usage de la force). La coterie de nos dirigeants européens actuels illustre fort bien cette tendance.
Ainsi, de clips en campagnes de marketing aux couleurs acidulées, de points presse en communiqués policés, tout ce que compte l’Europe d’importants personnages nous a assuré de l’inclusivité, de l’ouverture d’esprit et de la grandeur d’âme de la construction européenne et de ses institutions. On nous a seriné que « l’Europe, c’est la paix » et, dans le même souffle, qu’elle entendait porter haut ses valeurs de démocratie, de liberté et d’égalité des citoyens.
Avec l’arrivée du dernier petit virus à la mode il y a deux ans, on a cependant pu remarquer quelques lézardes dans la belle assurance de l’Europe et dans le concert des États membres qui l’animent. Bousculade lors de l’achat de certains approvisionnements médicaux, certains n’hésitant pas à aller sur les tarmacs, au pied des avions des autres, pour négocier le rachat à prix d’or de masques telle ou telle indispensable fourniture, démonstration que la puissance politique agit avec fermeté et détermination.
Les commandes de milliards de doses de petites injections miracles ne furent pas non plus spécialement représentatives d’un processus aussi démocratique que transparent. On attend encore des éclaircissements sur les échanges de SMS entre la présidente de la Commission et le PDG de Pfizer, par exemple.
De la même façon, l’introduction d’un passeport vaccinal dans différents pays d’Europe aurait dû déclencher au moins un scandale au Parlement, devant l’abandon des principes d’égalité des citoyens et de proportionnalité dans les démarches politiques entreprises, tout comme les confinements ou les couvre-feux. Il n’en fut rien, montrant à tous que les institutions européennes étaient autant de vent inutile que les institutions nationales, reléguées à un pure rôle subalterne et piteux de Chambres d’enregistrement.
Début janvier, ces valeurs européennes avaient déjà pris leur comptant de gifles et de crocs en jambe. Avec la crise ukrainienne, l’agression des principes de base de tout ce qui fait la civilisation européenne se fait maintenant à l’arme blanche aiguisée à coup de tweets : en l’espace de quelques jours, le citoyen européen lucide assiste, médusé, à l’abandon des principes fondateurs et de l’idéologie européenne. Voilà qu’Ursula Von Der Leyen, après avoir fait VRP pour labos pharmaceutiques, se retrouve dans le trafic d’armes : dans ce qui est présenté comme historique (‘consternant’ aurait été mieux choisi), la présidente de la Commission et le chef de la diplomatie, Josep Borrell, ont lancé pour 450 millions d’euros d’achat d’armes à destination de l’Ukraine, en utilisant avec un cynisme froid la ligne budgétaire « Facilité européenne pour la paix ». |
Si vis pacem para bellum, je présume et ça tombe bien, la guerre est déjà là : on gagne un temps fou ! On peine à voir quel mandat confère ainsi à Borrell et Von Der Leyen le droit de se lancer dans une telle manœuvre et dans quelle mesure tout ceci ne va pas aggraver le conflit. La stupidité de ce genre d’annonces, qui bafoue à peu près tout ce qu’il convenait jadis d’appeler les principes fondateurs de l’Union européenne, rivalise en fait avec l’incroyable Niagara d’imbécilités qui se sont accumulées ces derniers jours pour bien faire comprendre à tous et à chacun que la guerre devait être totale contre la Russie, son peuple et chacun de ses habitants. Ceci n’est pas une exagération : outre les déclarations parfaitement consternantes d’un Bruno Le Maire, ministre indigne d’une économie française en complète déroute, dans lesquelles il parle justement de « guerre totale » (l’inculture du bonhomme permettra d’imaginer qu’il n’a pas la référence à Goebbels), on découvre la multiplication, en France comme ailleurs, de tout ce qui ressemble vaguement à du Russe : sportifs et artistes sont bannis plus vite qu’on ne peut prononcer leur nom, des commerçants (d’origine ukrainienne !) de spécialités russes se retrouvent menacés par voie épistolaire, on tente d’éliminer Dostoïevski d’une université italienne, on envisage de ne pas retourner les pièces de la collection Morozov, on confisque les avoirs de Russes qui ne vivent plus en Russie, sans procès – ce qui donne une excellente idée de ce qui se passera pour les dissidents français, dans quelques mois ou quelques années, et pire que tout, on bannit les chats russes de compétitions de chats !
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