samedi 1 juin 2019

VERS UNE NOUVELLE CONSTITUTION

Ce que la nouvelle réforme de la Constitution va changer

Présentation des grandes lignes du nouveau projet, révélé par Le Monde - et confirmé par un conseiller gouvernemental au Figaro.

 «Préservation de l’environnement» dans les principes de la République

Aujourd’hui: Fondamental, l’article premier de la Constitution consacre la «République indivisible, laïque, démocratique et sociale» ; «l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion» ; le respect de «toutes les croyances» ; la décentralisation ; et «l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu’aux responsabilités professionnelles et sociales».
Ce qui doit changer: L’écologie devrait intégrer ce premier article. «(La République française) agit pour la préservation de l’environnement et de la diversité biologique et contre les changements climatiques», devrait mentionner la loi fondamentale. Le texte reprend ainsi la formulation de l’amendement voté par les députés en commission, l’été dernier. Alors ministre de la Transition écologique, Nicolas Hulot avait défendu l’intégration de l’écologie dès le premier article de la Constitution, plutôt que dans l’article 34, comme le prévoyait la première version de la réforme.

Référendum élargi aux «questions de société»

Aujourd’hui: La question d’un référendum ne peut porter que sur trois thématiques, délimitées à l’article 11 de la Constitution: l’organisation des pouvoirs publics ; la politique économique, sociale ou environnementale de la nation et les services publics qui y concourent ; et la ratification d’un traité.
Ce qui doit changer: Le champ du référendum devrait être élargi aux «réformes relatives aux questions de société». Une précision sera aussi apportée: «l’organisation des pouvoirs publics» concernerait les «pouvoirs publics nationaux ou territoriaux».

 Les citoyens bientôt à l’initiative d’un RIP assoupli mais encadré

Aujourd’hui: Un cinquième des membres du Parlement (185), d’abord, et un dixième des électeurs (environ 4,7 millions), ensuite, sont nécessaires pour déclencher un référendum d’initiative partagée (RIP). Cette procédure ne peut toutefois pas avoir pour objet l’abrogation d’une disposition promulguée depuis un an. Permise par la révision constitutionnelle de 2008 et incluse dans l’article 11, elle est entrée en vigueur en 2015. À ce jour, le seul - et premier - RIP engagé vise à affirmer le caractère de service public national de l’exploitation des aéroports de Paris (Groupe ADP). Les signatures des parlementaires ont été réunies, la collecte de celles des citoyens doit commencer mi-juin.
Ce qui doit changer: Seuls un dixième des membres du Parlement et un million d’électeurs seront désormais requis pour déclencher la procédure. Sans que le filtre parlementaire précède forcément le filtre citoyen: la proposition de référendum pourra être provoquée en premier par les Français. Plus souple, le nouveau RIP sera toutefois plus encadré: il ne pourra pas viser l’abrogation d’une disposition promulguée «depuis moins de trois ans», ni d’«une disposition en cours de discussion au Parlement». Sur la forme, le RIP devrait intégrer un titre à part entière de la Constitution consacré à la «participation citoyenne» - le titre XI, selon Le Monde.

Un Conseil de la participation citoyenne (CPC) à la place du CESE

Aujourd’hui: Le Conseil économique, social et environnement (CESE) est la troisième assemblée de la République, après l’Assemblée nationale et le Sénat. Créé en 1946, il est consultatif et conseille le gouvernement et le Parlement par ses avis. Ses 233 membres représentent la société civile et sont désignés pour cinq ans par des organismes divers (syndicats, associations et organisations de jeunesse, notamment).
Ce qui doit changer: Le CESE devrait devenir le Conseil de la participation citoyenne (CPC), plutôt que la Chambre de la société, appellation prévue dans le précédent projet. Quelque 155 membres devraient le composer. Son champ d’action devrait s’agrandir: il sera en charge de la consultation du public, via l’organisation des conventions de citoyens tirés au sort, à son initiative ou à celle du gouvernement.

L’accélération de la procédure parlementaire écartée

Ce qui est abandonné: Les dispositions controversées visant à accélérer le travail du Parlement sont retirées du nouveau projet de révision, selon Le Monde. La version initiale prévoyait:
- l’examen d’amendements uniquement en commission, alors qu’ils passent aujourd’hui devant la commission concernée puis en séance publique ;
- un durcissement des conditions de recevabilité des propositions de loi et amendements des députés ;
- une plus grande maîtrise de l’ordre du jour par le gouvernement, en lui donnant la possibilité d’inscrire en priorité des projets de loi ;
- une limitation des allers-retours des textes entre l’Assemblée nationale et le Sénat (la «navette parlementaire»), en supprimant une lecture par le Sénat.
Vues comme un «affaiblissement du Parlement» par les oppositions, et «du Sénat», par son président, Gérard Larcher, ces mesures sont écartées. «Pas mal de lignes rouges ont été enlevées», a concédé vendredi l’entourage du premier ministre. Ce retrait de dispositions polémiques pourrait faciliter l’accord entre l’Assemblée et le Sénat, indispensable pour que la révision de la Constitution arrive à son terme - à moins d’un passage en force par référendum.

 Corse, fin des présidents au Conseil Constitutionnel... Les autres dispositions restent en l’état

Ce qui doit changer comme prévu: Les autres modifications ne changent pas. La réforme prévoit toujours:
- un «droit à la différenciation» pour les collectivités territoriales, afin d’élargir leur liberté d’administration et pérenniser les expérimentations déjà rendues possibles dans la loi ;
- l’inscription de la Corse et de ses «spécificités», après l’article 72-4 de la Constitution ;
- la suppression de la Cour de justice de la République - juridiction d’exception crée en 1993 pour juger les ministres pour des crimes et délits commis dans l’exercice de leurs fonctions ;
- la fin de la présence automatique des anciens présidents de la République au Conseil constitutionnel ;
- la réforme du Conseil supérieur de la magistrature (CSM): les magistrats du parquet seront nommés sur avis conforme du CSM, qui disposera de pouvoirs de sanctions à leur endroit.

Deux autres volets dans la réforme des institutions

Outre cette révision constitutionnelle - la vingt-cinquième depuis 1958 -, deux autres volets composent la réforme des institutions:
- un projet de loi organique, avec notamment la réduction du nombre de parlementaires (25% à 30% de moins, souhaite Emmanuel Macron) ;
- un projet de loi ordinaire, comprenant l’élection d’une partie des députés à la proportionnelle (environ 20%, a évoqué le chef de l’État).
Afin d’aboutir à un accord entre le gouvernement et les deux chambres du Parlement, les ministres de la Justice et des Relations avec le Parlement rencontreront la semaine prochaine les présidents de tous les groupes parlementaires, selon Public Sénat. L’exécutif veut aller vite, mais il ne pourra rattraper son retard. À peine arrivé à l’Élysée, Emmanuel Macron avait expliqué vouloir parachever sa réforme des institutions «d’ici un an». C’était en juillet 2017.

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