Zemmour pour les nuls
Face aux tombereaux de mensonges et de calomnies sous lesquels on tente d’ensevelir Eric Zemmour, un peu de pédagogie – et beaucoup de bonne foi – s’imposent pour comprendre son discours de vérité.
Il ne suffit plus de vaincre ses ennemis, il faut convaincre ses amis
Longtemps je me suis cru démocrate. À présent, j’ai des doutes. Dans notre République où un chef ne peut plus sortir que des urnes, pour sauver le pays de l’islamisation, du déclin et de la tiers-mondisation, il faut persuader une majorité de votants de ne pas se tromper de candidat. Devant la difficulté de la tâche, je suis parfois nostalgique d’une époque où, pour que la France reste une nation libre, il suffisait de vaincre ses ennemis. Aujourd’hui, en campagne, on ne risque plus de périr fendu en deux par un cimeterre ou torturé par la Gestapo, mais on est condamné à convaincre ses amis. On ne meurt plus au champ d’honneur mais on peut devenir fou de rage et de désespoir, à ramer pour essayer d’ouvrir les yeux de ces malcomprenants qu’influencent les malveillants.
Meeting d’Eric Zemmour à Villepinte, 6 décembre 2021 © EyePress News via AFP |
Depuis le début de la campagne, je m’épuise à faire entendre qu’en 2022, il faudra choisir entre Éric Zemmour et la régression, la soumission et le suicide français. J’arrive toujours après la bataille médiatique qu’on livre au candidat à coups de citations tronquées qui deviennent des raccourcis calomnieux que l’on répète partout sur tous les tons et avec lesquels on le rend raciste et misogyne. Il faut être drôlement didactique pour passer derrière celui qui parle franchement et parie sur l’intelligence des Français, et il m’arrive d’envier les militants qui soutiennent un de ces candidats qui ménagent les veaux et prennent les gens pour des cons mais pas longtemps. À eux la démagogie, à moi la pédagogie. Le défi est de taille, mais je le relève en me souvenant que ce n’est pas le chemin qui est difficile, mais que c’est « difficile » qui est le chemin. Nos parents ont bien réussi à nous faire adorer un patriarche qui a frôlé l’infanticide, on doit pouvoir faire élire un candidat qui ne mâche pas ses mots. Impossible n’est pas français.
On accuse Zemmour d’être raciste. On l’a tant calomnié qu’il en reste quelque chose mais évidemment, il ne l’est pas. Non pas parce qu’être raciste est immoral ou politiquement incorrect mais parce qu’il est idiot de croire à la supériorité de la race blanche sur n’importe quelle autre. Il suffit de comparer Barack Obama à Frank Ribéry pour en être convaincu.
Un candidat qui n’est pas d’extrême droite
Il n’est pas non plus d’extrême droite. Il répète avec Jacques Bainville que « la France est plus qu’une race, c’est une nation ». L’extrême droite, qui est groupusculaire, proclame sur ses affiches que « la nation, c’est la race ». Elle est plus près de Maurras qui affirmait qu’un juif ne peut pas être Français, que de Bainville. La ferveur de ces milliers de Français qui placent tous leurs espoirs en Zemmour, le petit juif d’Algérie, lui oppose un démenti sans appel. L’extrême droite racialiste est en voie de disparition, mais pas le racisme, qui renaît en France à cause des indigénistes et des décoloniaux. Il y a un an ou deux, une fresque a été inaugurée à Cergy-Pontoise par ses élus pour dénoncer les violences policières et victimiser Adama Traoré, délinquant notoire qui a résisté à son arrestation alors qu’il n’avait pas la santé pour. Beaucoup ont protesté mais seule l’extrême droite, la vraie, s’est aventurée en territoire perdu pour la vandaliser. On peut le déplorer, mais sur ce coup-là, ce sont les racistes et les antisémites d’« Oeuvre française » (IL Faut une cap c’est un mouvement) qui ont sauvé l’honneur. Par ailleurs, même si leur conception ethnique de la nation est détestable, je reconnais plus de légitimité à un suprémaciste blanc sur la terre de ses ancêtres qu’à un type qui affirme que le voile est une tenue française ou que le prénom Mohamed est un prénom français.
On le dit aussi pétainiste. Ben voyons ! Et pourquoi pas nostalgique du IIIe Reich ? Dans ses écrits, Zemmour ne réhabilite pas Pétain, il réhabilite la nation. Contre Paxton qui jette le bébé nation avec l’eau du bain de la révolution nationale, et contre les bêtises du genre « le nationalisme, c’est la guerre » qui sortent de la bouche des adolescents et des types pas finis idéologiquement, il rappelle une réalité historique confirmée par l’historien Alain Michel dans un entretien donné à Causeur. Pétain n’a ni voulu ni cherché à préserver les juifs, mais la politique de Laval qui a tenu tant qu’il a pu à protéger les Français, juifs ou pas, a permis de sauver de la déportation et de l’extermination 90 % des juifs français. Il a donné pour cela aux Allemands les juifs étrangers, réfugiés politiques et naturalisés depuis peu, et les juifs d’Algérie, juifs « Crémieux » dénaturalisés par Vichy (infamie morale que Zemmour ne nie pas). Laval pouvait-il faire autrement ? Après la défaite, avait-il les moyens de rester moral ? Les conseils juifs des ghettos de Pologne pouvaient-ils faire autrement ? La controverse historique peut être nourrie, la question est ancienne et mérite d’être posée, mais ce n’est pas celle qu’on balance à la figure du candidat qu’on prend pour l’essayiste. On lui demande avec toute la malhonnêteté intellectuelle du journaliste dans le vent : « Pourquoi voulez-vous réhabiliter Pétain, monsieur Zemmour ? Pour plaire à vos lecteurs antisémites ? »
Beaucoup de reproches mais peu de bonne foi
On lui reproche encore de faire l’apologie du terrorisme. Dans Causeur, le reconquistador en chef qui considère les djihadistes comme des combattants islamiques et des ennemis héréditaires plutôt que comme des déséquilibrés radicalisés victimes de discriminations avouait avoir une forme de respect pour ceux qui avaient gardé ce que nous avions perdu, l’aptitude à mourir pour une cause qui les dépasse, en l’occurrence une religion et une civilisation. Il s’agissait alors de ces jeunes Français musulmans partis en Afghanistan combattre la plus puissante armée du monde. Il exprimait le respect que l’on peut avoir pour son ennemi. Il va de soi qu’il ne visait pas Mohammed Merah, un délinquant passé 18 fois devant le juge, entré dans une cour d’école pour assassiner une petite fille juive d’une balle dans la tête.
Dans un chapitre de son dernier livre intitulé « la terre et les morts », Zemmour observe que tous les protagonistes des assassinats de Toulouse ont été enterrés ailleurs qu’en France, le tueur franco-algérien comme ses victimes, le soldat franco-marocain et les enfants juifs. Sans plus de précision, le propos a choqué. Depuis, on lui demande sans relâche : « Mais comment peut-on reprocher à la famille Sandler d’avoir enterré ses enfants en Israël ? » Le sujet est si douloureux que beaucoup en perdent la raison et ne réagissent qu’avec émotion. Naturellement, Zemmour ne reproche rien à personne et surtout pas aux parents d’enfants assassinés. Mais son exemple est mal choisi. Mal choisi d’abord parce que les Sandler ne sont pas des juifs franco-israéliens qui rêvaient de vivre en Israël mais des israélites français attachés à la France depuis des générations. Mal choisi ensuite parce que c’est la France qui a désespéré et contraint à l’exil cette famille meurtrie par le nazisme hier et par l’islamisme aujourd’hui. Mal choisi enfin parce qu’on enterre ses morts dans le pays où ils reposeront en paix à défaut de les inhumer dans le pays de son choix. Si l’exemple était indélicat, la démonstration est pertinente et méritait que l’on en débatte. On a préféré s’offusquer et s’arrêter sur la supposée insensibilité de l’essayiste.
On est effectivement très loin des présidents sensibles, de Chirac quand il a vu le film Indigènes, de Hollande avec Leonarda ou de Sarkozy renonçant à la double peine, et certains semblent regretter ces « humanistes » pour qui les réfugiés déboutés ou les criminels repris de justices sont invirables. Bien sûr, leurs propos n’ont jamais blessé personne, ce sont leur inertie, leur lâcheté ou leurs bons sentiments qui ont tué des Français.
Manifestation contre la candidature d’Eric Zemmour à l’élection présidentielle, Paris, 5 décembre 2021 ©getty Images via AFP |
Enfin, on le dit misogyne ou sexiste, sans trop savoir pourquoi ni comment, ni sur quelle déclaration on s’appuie. Il l’avait prévu et prévenu dans les premières lignes du Premier sexe : « Je sais qu’il n’y a pas l’Homme et la Femme mais des femmes et des hommes. Pas de généralités mais uniquement des cas particuliers. » Peu importe, les imbéciles ou les féministes et surtout les féministes imbéciles ne veulent rien entendre. Les chiennes de garde n’en démordent pas, le différentialisme ou l’attachement aux « stéréotypes sexistes » mène à la culture du viol aussi sûrement que la nation mène au racisme et à Auschwitz. Dans son essai, Zemmour se garde bien d’essentialiser, de réduire chaque individu aux généralités de l’espèce de son genre, il n’est pas idiot. Il sait qu’il y a plus de virilité dans trois lignes d’Oriana Fallaci quand elle regarde l’ennemi en face que dans l’œuvre complète de Claude Askolovitch, grand défenseur des « mamans » en niqab exclues des cars scolaires. Là aussi, dans le procès en sexisme qu’on lui intente, on extrait opportunément une phrase d’une analyse qui relève de l’anthropologie, de la recherche historique ou de la sociologie et qui passerait comme une lettre à la poste un matin sur France Culture si elle sortait de la bouche d’un chercheur du CNRS ou d’un écrit de Claude Lévi-Strauss, et on en fait un délit d’opinion parce qu’elle nous vient d’Éric Zemmour.
Mais qu’est-ce que le sexisme aujourd’hui dans notre société hypersensible et dans nos médias hyperorientés ? Pour Raphaël Enthoven, est sexiste celui qui veut interdire la PMA aux couples de femmes. Pour Élisabeth Moreno, est misogyne celui qui rejette les lois sur la parité. Ne pas souhaiter qu’un enfant naisse d’une éprouvette plutôt que d’un père et grandisse entre deux lesbiennes, ou ne reconnaître que le mérite comme source d’émancipation et de promotion des individus. Voilà comment l’écho médiatique tombe dans l’oreille du sourd, du paresseux et du malentendant, et voilà comment Zemmour se retrouve « misogyne », « répand la culture du viol », « veut remettre en cause les droits des femmes », puisqu’ils l’ont dit à la télé.
Tout cela va de soi mais tout va mieux en le disant. Voilà pourquoi, inlassablement, je rajoute les pièces manquantes du puzzle, j’explique Zemmour pour les nuls. Voilà comment, en petite main du zemmourisme, je m’active à raccommoder les déclarations mises en lambeaux par ses détracteurs, pour repriser les trous du discours dans lesquels les adversaires s’engouffrent, pour ramener les propos du candidat, quand il exagère, à la mesure des gens mesurés car si l’exagération est un levier pédagogique, comme il dit, elle ne l’est pas pour celui qui ne veut pas comprendre.
Le général Bonaparte au Conseil des Cinq-Cents, à Saint-Cloud, 10 novembre 1799, François Bouchot, 1840 – D.R |
On discute peu le fond, on réprouve la forme
En militant tacticien, au lieu de secouer ces citoyens paresseux et endormis, j’écoute les objections avec patience et diplomatie. Elles sont souvent consternantes. On n’oppose pas à Zemmour des arguments et des idées mais des sensibilités, des craintes, des pudeurs. Je croise assez peu d’opposants idéologiquement ou politiquement solides, mais des vierges effarouchées aux cœurs d’artichauts. On discute peu le fond, on réprouve la forme. On le trouve violent et brutal, on pense qu’il n’a pas la carrure pour le poste, on s’inquiète pour l’État de droit, on le voit dictateur, on n’aime pas ses manières. On le trouve grossier quand, à Marseille, il a un geste déplacé pour recadrer une opposante insultante. Mais une riposte immédiate et proportionnée n’est-elle pas la preuve qu’on a les attributs qu’il faut pour être autre chose qu’un figurant ou le dindon de la farce dans les rapports de forces des relations internationales ?
Si l’on étudiait le zemmourisme à travers les siècles, on découvrirait sûrement que nos glorieux aînés ont aussi inspiré les craintes et les méfiances de tous les trouillards, de tous les cœurs tendres, de toutes les chochottes et de toutes les « Nadine de Rothschild » de tous les temps. On a sûrement trouvé Charles Martel violent et brutal quand il s’est montré plus royaliste que le roi fainéant de son époque et qu’il s’est levé pour arrêter les Arabes. Quand Jeanne d’Arc a pris les armes, on a sans doute pensé qu’elle n’avait pas la carrure pour bouter les Anglais hors de France. On a tremblé pour l’État de droit quand Bonaparte a envahi la Chambre des députés ou quand de Gaulle a désobéi pour organiser la Résistance.
Quand l’heure est grave et commande un peu d’audace et de virilité, les plus timorés d’entre nous redoublent d’attentions délicates pour les formes et se planquent derrière le droit, les usages et les procédures qui protègent des aventures et des vraies ruptures. Sur le Bataclan comme sur Vichy, on ne lui pardonne pas de nous avoir rappelé que le rôle du chef de l’État est de s’inquiéter pour les Français en danger, pas pour son image de président ouvert sur le monde et généreux pour l’histoire. À l’homme d’État qui promet de prévenir et d’agir, de préserver et de réprimer, on semble préférer les présidents des cellules psychologiques, des marches blanches, des nounours éclairés à la bougie et des pleureuses. Pour les petits enfants gâtés du siècle, la raison d’État est une infamie et la moindre contrainte sur l’individu un abus de pouvoir. On est prêts à mettre des ministres en prison parce qu’une pandémie fait des morts et on hurle « liberté » contre un vaccin ou un pass sanitaire. On ne veut pas vivre en terre d’islam mais attention, touche pas au prénom de mon pote ou au voile de sa femme. Évidemment, à ceux qui craignent de froisser l’aile d’une mouche, et surtout de passer pour des ringards quand ils disent le mot France, le candidat fait peur.
Hier, on s’interrogeait sur l’opportunité d’accorder le droit de vote aux femmes. On se trompait. Aujourd’hui, ce ne sont pas les femmes qui compromettent le salut de la France, ce sont les femmelettes.
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