Le dangereux périplaquisme de Zemmour
par H16Apparemment, l’ascension de Zemmour dans les sondages n’est plus aussi fulgurante qu’il y a un mois. Peut-être a-t-il atteint son palier naturel ? Peut-être n’est-ce qu’un plateau momentané avant une reprise d’envol ? En tout cas, en un mois, il a clairement charpenté son positionnement politique.
On pourra prendre à témoin l’un de ses derniers discours, à Bordeaux, dans lequel l’essayiste polémique dresse sur certains points un constat assez pertinent du pays, notamment lorsqu’il aborde les problèmes rencontrés par les entrepreneurs, les artisans, les commerçants et, finalement, ceux qui font le tissus économique de la France.
Soyons honnête : il est éloquent lorsqu’il évoque la liberté, trop restreinte, des patrons et des employeurs. Il fait même du libéralisme comme Jourdain de la prose, sans trop s’en rendre compte ou en se cachant bien de le montrer, lorsqu’il évoque ses positions économiques dans lesquelles il décrit bien l’enfer administratif et fiscal français.
Il est clairement du bon côté de cette liberté lorsqu’il réclame sans ambages qu’on lâche enfin la bride aux Français en élaguant les trop nombreuses lois, régulations et contraintes dont le peuple souffre sans arrêt.
Il est juste lorsqu’il évoque le régalien et l’importance d’un retour rapide à un régalien solide, à la nécessité de résoudre le problème d’insécurité, de faire disparaître les quartiers de non-droit, à réduire les brouhahas du communautarisme et les exactions de la racaille.
Tout ceci est fort bon, mais il y a comme un petit souci de cohérence qui explique peut-être le tassement observé dans les sondages : lors d’une séance de questions-réponses avec le public, interrogé sur sa position vis-à-vis du pass sanitaire, Zemmour avait clairement expliqué que « le pass sanitaire, ça ne me dérange pas plus que ça » et qu’il y voyait, éventuellement, un danger de dérives dans l’avenir sans préciser si, une fois élu, il envisageait de le conserver ou non.
Certes, on retrouve sa position dans différentes vidéos où il explique bien ce positionnement pour le moins minimaliste voire ambigu : le candidat putatif redoute fort de prendre une position trop tranchée contre cette mesure, au risque de détourner – dit-il – l’attention des Français de ce qu’il estime être plus prégnant, à savoir la menace qu’il estime civilisationnelle et culturelle qu’il brosse au travers des thèmes de l’immigration, de l’insécurité et du communautarisme.
Sauf que voilà, M. Zemmour, c’est bien joli cette position, mais c’est bancal.
Parce qu’à tout bien considérer, le traitement de ces questions qu’il juge essentielles nécessite un régalien solide.
Or, un régalien qui fonctionne ne peut pas s’encombrer d’aller fouiller dans les tripes des citoyens pour y découvrir ou non tel ou tel virus. Un régalien efficace, c’est un régalien qui s’assure que les citoyens sont bien égaux en droit et qui, donc, ne les sépare pas en deux classes distinctes, qui n’en fait pas, de facto, deux communautés distinctes, quasiment ennemies. Un régalien qui fonctionne, ce sont typiquement des forces de l’ordre occupées à garantir que des quartiers entiers ne deviennent pas invivables, au lieu de les mobiliser à vérifier les citoyens en terrasse.
Et cela veut très concrètement signifier d’arrêter de mobiliser ce régalien sur les cibles faciles, l’individu solvable, pour s’occuper enfin de celui qui vole ou viole, agresse, blesse, mutile, harcèle, injurie le premier.
Or, pour le moment, on mobilise des troupes pour jouer à la brigade des terrasses et de la limonade, et on n’en mobilise guère pour nettoyer les rues de certaines villes devenues de vrais coupe-gorge (littéral
Soyons clairs : on trouve beaucoup plus de régalien à bipper du boomer qui sirote un panaché que de régalien pour chopper du Dalton dans les rues de Lyon.
Le bilan d’une politique qui considère que, finalement, le pass ne dérange pas, c’est le contraste saisissant entre d’un côté des policiers qui patrouillent d’un restaurant à l’autre, et ce quartier de Lyon où les magasins (un supermarché et un McDonald’s par exemple) sont obligés d’adapter leurs horaires pour limiter les agressions et l’insécurité latente qui y règne.
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