- Alors que des mesures de reconfinement sur les communes littorales des Alpes-Maritimes viennent d’être décidées, le Dr Guillaume Barucq estime au contraire qu’il faut desserrer l’étau en bord de mer.
- Les contaminations se font généralement « en milieu fermé », analyse-t-il, et les plages ne seraient pas des environnements « à risque. »
- Il estime également que le couvre-feu « dans une zone comme la nôtre est une aberration. »
Il prône les bienfaits du grand air… Alors qu’un confinement le week-end a été décidé dans les villes littorales des Alpes-Maritimes, et que la reprise de l’épidémie est sous haute surveillance à Dunkerque, le médecin généraliste Guillaume Barucq à Biarritz (Pyrénées-Atlantiques) prône au contraire un relâchement des mesures dans les zones littorales. Après avoir été adjoint à l’environnement au maire de Biarritz Michel Veunac (MoDem), Guillaume Barucq était arrivé deuxième aux dernières municipales (26,3 %) sous une liste « écolo-centriste ». Il est aujourd’hui conseiller municipal de la ville. Il est également l’auteur de SurfTherapy et Detoxseafication. Il a répondu aux questions de 20 Minutes.
Vous prenez beaucoup la parole sur les réseaux sociaux, notamment pour dénoncer les mesures de confinement sur les zones littorales, pourquoi ?
Confiner une bande littorale est un non-sens. Je suis un des rares médecins à s’intéresser encore à ce qu’était la médecine d’autrefois, notamment ce qui a fait l’origine de la thalassothérapie en France. Pendant des décennies, les médecins ont prescrit des environnements, des climats où on savait que les conditions de vent, d’ensoleillement, étaient les meilleures pour prévenir notamment les infections. Et il semble qu’en 2021, on ait rayé d’un trait de plume ces connaissances de base. On nous demande, lorsqu’on est chez nous, d’aérer nos pièces, et d’un autre côté on n’arrive pas à reconnaître que les lieux extérieurs ne sont pas des lieux de transmission, c’est illogique.
Toutefois, dans les Alpes-Maritimes, on voit bien que la progression de l’épidémie est repartie nettement à la hausse…
Oui, mais la question qu’il faut se poser, c’est de savoir où se sont contaminées ces personnes ? Pas sur la promenade des Anglais ou sur les plages, mais comme partout ailleurs dans des lieux fermés, des domiciles, des structures de soin. Les plages, même quand il y a du monde, ne sont pas une zone à risque, car l’air y est constamment renouvelé. Donc si les personnes se contaminent à l’intérieur, la logique voudrait qu’on les incite à être davantage à l’extérieur. Laissons les gens profiter, ils en ont besoin pour leur santé physique, respiratoire, et psychologique…
Vous allez plus loin, et vous dites même que porter le masque en plein air est inutile ?
Il n’y a aucune étude qui prouve qu’il y a un intérêt à porter un masque en plein air. Le masque en plein air – bord de plage, campagne et montagne – ne sert à rien. On peut être libre de le porter, pourquoi pas, mais je ne comprends pas que l’on continue à obliger quelque chose d’irrationnel scientifiquement. On pourrait, à la limite, se poser la question pour certaines rues ultra-fréquentées, même si je n’ai jamais entendu parler d’un cluster rue Sainte-Catherine à Bordeaux... On se contamine dans un espace fermé où il y a au moins une personne infectée, et quand on n’ouvre pas les fenêtres, alors la charge virale augmente dans la pièce. Il faut arrêter de croire que l’on se contamine en respirant une bouffée d’air où il y aurait un coronavirus dedans. Cela ne suffit pas pour s’infecter. Et il faut rappeler que l’air marin, riche en sels minéraux, est bénéfique car il favorise la santé respiratoire. Il faut conseiller le bord de mer !
Si l’on vous écoute, tout le monde va se précipiter demain vers les plages, et on va se retrouver alors avec des littoraux bondés, ce qui pourrait créer un risque, non ?
Nos stations balnéaires sont nées à l’époque de la tuberculose. On avait commencé par mettre les gens en quarantaine, en les enfermant, mais on ne se sortait pas des épidémies. Quand des médecins se sont rendu compte que l’air de la mer est bénéfique, on a envoyé les gens par centaines en bord de mer. Sur l’Atlantique on a quand même des plages qui s’étendent sur des dizaines de kilomètres. On a eu un monde fou l’été dernier, et il n’y a pas eu un point de départ de contamination. Je reconnais que sur la Méditerranée certaines situations, avec parfois de grandes villes et de petites plages, sont plus problématiques.
Selon vous, il faudrait également lever le couvre-feu à 18 heures, qui serait contre-productif ?
Il y a une étude toulousaine qui montre que cela aggrave les choses. Le couvre-feu dans une zone comme la nôtre est une aberration. A Biarritz on n’est pas en situation épidémique, pourquoi est-ce qu’on incite les gens à aller se confiner en fin d’après-midi, alors qu’il fait beau ? Moi, cela me rassure davantage de voir des jeunes organiser un apéro sur la Côte des Basques, que de savoir qu’ils font des soirées en milieu confiné. Pourquoi est-ce que les épidémies s’effondrent dès que les beaux jours reviennent ? Il y a des conditions environnementales, mais c’est aussi lié à nos attitudes : dès qu’il fait beau nous sommes davantage dehors, et les chaînes de transmission se cassent d’elles-mêmes. Pour sortir durablement de cette épidémie, il faut entrer dans une logique d’aération des populations.
D’autant que tout cela a également des effets psychologiques sur la population, aussi ?
Les effets sont calamiteux. Il y a une chappe de plomb sur la population, qui est morose. Sur notre patientèle, nous avons observé une aggravation sur les patients qui avaient déjà des problèmes psy, et on a vu apparaître de nouveaux patients qui n’avaient aucun antécédent psychiatrique et qui ont perdu pied durant cette épidémie, pour des raisons économiques, sociales, ou à cause d’un manque d’espérance. Beaucoup de gens équilibrent leur vie grâce à des activités sportives ou culturelles, interdire tous ces exutoires, augmente les niveaux de stress dans les populations. C’est pourquoi il est temps de desserrer l’étau, d’autant que la vaccination arrive et qu’on connaît désormais bien ce virus et ses modes de transmission.
On peut toutefois estimer que le gouvernement entend ces arguments, puisque seules des mesures de confinement localisées sont prises à l’heure actuelle, alors que certains scientifiques réclament un confinement plus dur à l’échelle du pays ?
Enfin, ai-je envie de dire… Mais on a été un pays qui a plus confiné que les autres. Et les pays qui confinent aujourd’hui, alors qu’ils avaient moins confiné que nous jusqu’à présent, ont des ressources mentales supplémentaires dans la population, je pense à l’Allemagne notamment. Nous avons déjà subi deux confinements, et le deuxième a mis un véritable coup derrière la tête des gens, un troisième serait le confinement de trop. Le président de la République en est conscient, je le reconnais, face à quelques personnalités scientifiques médiatiques, qui sont rarement des médecins de terrain. Pour avoir une idée de la crise, il faut en parler à son médecin généraliste, qui a une très bonne idée de ce qui se passe en population générale.
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