L'ÉDITO DE L'OPINION
Relance
Du danger de la dépense émotionnelle
Par Rémi Godeau
Pour sortir de la crise du coronavirus, l’Etat est à son meilleur. Chantre de la providence, il distribue. Rebelle à la discipline budgétaire, il distribue beaucoup. Sourd à toute contestation de son omniscience, il distribue sans souci d’efficacité. Sous couvert de keynésianisme (certes nécessaire), ce penchant à la facilité a pris des proportions folles avec la Covid-19, que seule l’émotion suscitée par le bilan morbide empêche de dénoncer. Les hérauts du « toujours plus » l’ont compris. Ils réclament davantage, et vite.
Malgré 7 milliards d’euros de revalorisations salariales proposés pour l’hôpital, les syndicats, qui en espéraient le double, crient leur dépit. Dans ce contexte, doit-on encore espérer que le « Ségur de la santé » permette également une réforme ambitieuse de l’organisation hospitalière ? Que ces indispensables augmentations n’éclipsent pas l’investissement, tout aussi essentiel ?
Sur les retraites dont Emmanuel Macron entend poursuivre la transformation, le passage au régime par points devrait se faire au prix de milliards supplémentaires et sans âge pivot, puisque la France ne saurait, paraît-il, supporter un débat sur le temps de travail…
Faibles avec leur administration, nos dirigeants se montrent plus fermes avec les entreprises. En échange de prêts garantis, ils exigent des engagements. Non sans raison, il s’agit de fonds publics. Mais non sans incohérence : peut-on, comme dans l’aéronautique ou l’automobile, mener de front la sauvegarde de l’emploi et le financement de la transition écologique quand l’activité s’effondre ?
Le choc récessif du confinement méritait une réplique à la hauteur. Elle l’est. Et tant mieux. Mais attention : le flot d’argent magique nourrit ce travers français qui fait de la dépense publique, devenue émotionnelle, la solution à tout, en quantité mais pas en qualité. Gare au réveil !
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