Edito libre
Coronavirus
Le piège d’un confinement sans fin
Par Remi GODEAU
Reconfiner avant même d’avoir déconfiné ? Le ministre de la Santé n’écarte pas cette aberration : la date du 11 mai, dit-il, peut « être remise en question. » Ajoutée à une carte des départements anxiogène, cette menace alimente le flou général. On comprend la manœuvre : dissuader les Français, soupçonnés d’indiscipline, de relâcher l’effort dans la dernière ligne droite et signifier que les « jours heureux » ne reviendront pas de sitôt. On mesure la difficulté de l’exercice : un déconfinement non maîtrisé pourrait relancer l’épidémie, au risque de nouveaux décès.
Cette communication n’en demeure pas moins dangereuse. Elle infantilise le citoyen. Elle fleure la défausse, comme si l’incivisme hypothéquait davantage la sortie de crise que les défaillances du commandement. Elle entretient surtout la défiance en laissant entendre que le déconfinement ne peut être qu’un pis-aller. Mais il faut assumer ce saut vers l’inconnu, la résilience plutôt que la résistance : indispensable, le retour à la vie normale ne sera pas sans dangers. La stratégie du « tests pour tous » est une illusion, la distanciation sociale incompatible avec les transports en commun, l’isolement total des contaminés impensable en démocratie. Faut-il pour autant que la France, déjà caractérisée par la récession la plus forte d’Europe, se singularise encore en étant la dernière à redémarrer ?
C’est tout le débat autour de la prolongation de l’état d’urgence sanitaire. Margaret Thatcher avait raison, l’Etat doit être un serviteur, pas un maître. Or la tentation est claire : parce qu’il n’est pas capable d’assurer un service minimum anti-Covid-19, l’Etat accentue sa férule avec un confinement prolongé et une limitation accrue des libertés. Voilà pourquoi réussir l’après 10 mai, au-delà d’une inutile culpabilisation des Français, est un enjeu collectif impérieux.
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