Retraites : la stratégie d'usure du gouvernement
C’est un gros risque que vient de prendre Edouard Philippe. Celui d’humilier, d’une manière ou d’une autre, l’ensemble du mouvement syndical français. Les uns demandent le retrait du projet, les autres l’abandon de " l'âge pivot" introduit dans la réforme par le Premier ministre. Au terme de deux jours de discussions, ni les uns ni les autres n’ont obtenu satisfaction.
Certes quatre dossiers sont rouverts, qui concernent la pénibilité, les transitions, et diverses autres garanties : petites avancées. Mais globalement, c’est non. La réforme est maintenue et les salariés devront dès 2022 travailler plus pour obtenir une retraite à taux plein : le gouvernement joue l’usure et le mouvement continue. Seul espoir pour Edouard Philippe : décrocher l’Unsa, syndicat fort dans les transports publics, en négociant un accord à la SNCF (c’est en cours) et à la RATP (on discute). Dès lors les trains et les métros circuleront en plus grand nombre. Stratégie de division et pari sur un effritement progressif à la faveur des fêtes de fin d’année.
Ce qui se heurte à deux obstacles. Le déficit annoncé du futur système reste d’une ampleur limitée. Il est lié à une baisse des ressources et non à une augmentation des dépenses. Le couperet dont on annonce l’instauration est donc d’une nécessité contestable. Il faudra encore des discussions ardues pour atténuer ce sacrifice supplémentaire demandé aux salariés.
La deuxième difficulté tient à l’attitude de l’opinion. Malgré la galère imposée depuis deux semaines aux usagers, le soutien au mouvement reste majoritaire. Mieux, ou pire : plus le gouvernement s’explique, plus le scepticisme monte quant à la légitimité de la réforme. Les concessions annoncées, dans ces conditions, ne sont pas à la hauteur des attentes. Les choses peuvent évoluer. Mais si on en reste là, un funeste message sera envoyé à l’opinion et aux protestataires.
Il y a un peu moins d’un an, les manifestations des gilets jaunes, émaillées de violence, ont débouché sur un recul dont le coût a été estimé à quelque 17 milliards. Aujourd’hui, alors que les manifestations sont parfaitement légales, encadrées et maîtrisées, le gouvernement passe son temps à mégoter, y compris avec les organisations les plus modérées. Dangereux contraste qui jette une ombre sur l’avenir des relations sociales en France.
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LAURENT JOFFRIN
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samedi 28 décembre 2019
LAURENT JOFFRIN- RETRAITES: LA STRATEGIE D'USURE DU GOUVERNEMENT
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