AU JARDIN CE WEEK-END - Ce week-end, le Muséum national d'Histoire naturelle et la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO) nous invitent à compter les oiseaux pendant une heure.
C'est un fait maintenant établi: il y a de moins en moins d'oiseaux dans nos jardins. Le Muséum national d'histoire naturelle qui procède à des comptages réguliers, notamment au travers du programme «Oiseaux des jardins» auquel participent plus de 30.000 particuliers, évalue la baisse des effectifs à 10% toutes espèces confondues au cours de la dernière décennie.
Pour enrichir ces données et prendre en compte les dernières évolutions, une nouvelle opération de comptage est organisée samedi et dimanche pour la 7e année consécutive à travers toute la France. Les amoureux de la gent ailée sont invités à participer qu'ils aient un jardin ou non, dans la mesure où il est possible d'effectuer l'opération dans un parc ou un jardin public ou collectif.
Les causes de ce phénomène préoccupant sont multiples. Outre les produits phytosanitaires régulièrement mis en cause, l'augmentation du parcellaire, la modification des pratiques agricoles, la suppression des haies et des jachères mais aussi la destruction de nombres d'habitats naturels liée à l'urbanisation (lotissements, zones commerciales, routes...), jouent un rôle au moins autant, si ce n'est plus important. Les espèces granivores sont les plus impactées: moineau friquet (à ne pas confondre avec le moineau domestique fréquent dans les villes), linotte mélodieuse, verdier d'Europe, chardonneret, bruant jaune, pour ne citer que ceux-là (voir leur photo dans le diaporama), enregistrent les baisses les plus fortes du fait de la dégradation de leur habitat naturel et de la diminution de leur garde-manger. À savoir les graines des herbes sauvages qui constituent l'essentiel de leur régime.
Bouvreuil pivoine mâle |
Un exemple parmi d'autres: depuis quelques années, les agriculteurs ont l'obligation de déchaumer leurs parcelles avant l'hiver afin d'y semer des engrais verts qui empêchent mauvaises herbes qui restaient auparavant en surface sont maintenant enterrées, si bien que les oiseaux se trouvent rapidement privés de nourriture», explique l'ornithologue Frédéric Jiguet, professeur au Muséum qui constate une baisse très nette des populations de chardonnerets et de verdiers depuis la mise en œuvre de cette mesure décrétée par l'Europe.
aux nitrates de migrer vers les nappes phréatiques. «Du coup, les graines de céréales, de colza ou de
Une étude publiée dans la revue scientifique Biological Conservation vient d'ailleurs de montrer que les espèces granivores fréquentent d'autant plus les mangeoires mises à leur disposition en hiver que l'agriculture alentour est intensive. «Comme ils trouvent de moins en moins de graines dans les parcelles agricoles, ces oiseaux viennent dans les jardins chercher une nourriture de substitution au fur et à mesure que l'hiver progresse» explique Frédéric Jiguet, cosignataire de cette étude avec sa collaboratrice Pauline Pierret, qui souligne, au passage, «le rôle important du nourrissage hivernal pour les oiseaux».
Enrayer le déclin de la gent ailée
Ne vous posez donc plus la question: outre le plaisir que cela procure, le fait d'installer des mangeoires dans son jardin entre la mi-novembre et la mi-mars contribue bel et bien à enrayer le déclin de la gent ailée. Faut-il le faire au-delà, pendant la période de reproduction? «A ce stade, la question n'est pas tranchée, poursuit Frédéric Jiguet. D'un côté, on augmente le nombre de portées, ce qui est positif, mais de l'autre, la viabilité des oisillons soumis à ce régime granivore risque d'être moins bonne. Des études sont programmées pour y voir plus clair. En attendant, mieux vaut interrompre le nourrissage pendant la période où les parents élèvent les petits quitte à le reprendre par la suite.»
Autres problèmes: les maladies. Le verdier d'Europe est victime d'une épidémie de salmonellose, une maladie bactérienne véhiculée par les fientes. D'où, au passage, l'importance de nettoyer régulièrement les mangeoires pour éviter la contamination. Plus surprenant encore: depuis cet été plusieurs espèces d'oiseaux, en particulier le merle noir, sont décimées par le virus isutu, un parasite transmis par un moustique. «Le comptage de ce week-end nous permettra d'évaluer précisément l'impact de cette maladie émergente sur les populations» poursuit Frédéric Jiguet.
Gare aux chats!
Pour avoir le maximum de chances de voir des oiseaux dans son jardin, il est bien évidemment recommandé, comme l'a vu, de les nourrir avec des aliments appropriés et d'installer des nichoirs. Le tout en les protégeant des chats avec des dispositifs recommandés par la LPO: substances et plantes répulsives (Coleus canina), grilles en plastique hérissées de picots placées sur les branches ou le tronc des arbres, appareil à ultrasons etc. Sachez qu'à l'échelle mondiale, la prédation de ces petits félidés est estimée à 4 milliards d'oiseaux tués chaque année. La prolifération des corneilles et des pies, grandes consommatrices d'œufs et d'oisillons, est également pointée du doigt.
Enfin, outre le nourrissage, sachez rendre votre jardin accueillant en laissant une place aux fleurs sauvages, en aménageant un point d'eau, en plantant des arbres ou des arbustes à baies, etc. Les oiseaux mais aussi les hérissons, les crapauds ou les musaraignes vous le rendront au centuple en vous débarrassant des pucerons, chenilles, limaces et autres parasites.
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