mardi 18 mai 2021

L'ISLAM EST-IL COMPATIBLE AVEC LA REPUBLIQUE?

 



Politique française

« L’islam est-il compatible avec la République ? »

par André Larané



Depuis les crimes du forcené islamiste Mohammed Merah en 2012, une question revient en boucle dans le débat public en France : « L’islam est-il compatible avec la République ? » sans trouver de réponse. Comment en irait-il autrement dès lors que les mots eux-mêmes sont dévoyés : de quel islam parlons-nous ? Et que recouvre le concept de république ?

La faute à la République ?

Revenons d’abord sur la République. Le mot a beaucoup évolué au cours de l’Histoire. Ainsi que nous l’écrivions déjà en 2011, il désignait jusqu’à la Révolution la « chose publique », autrement dit toute forme d’État ou de gouvernement. Avec l’abolition de la monarchie, en 1792, il en est venu à simplement désigner tout État qui ne serait pas monarchique.

Aujourd’hui, des États comme la Corée du nord, l’Iran ou le Venezuela sont des républiques mais n’ont rien à voir avec la démocratie comme nous l’entendons, laquelle s’exprime on ne peut mieux dans des monarchies comme le Royaume-Uni ou la Suède !

Dans la France du XXIe siècle, la référence à une République indéterminée reflète l’utopie d’une société post-nationale dans laquelle viendraient se fondre toutes les vagues d’immigration présentes et futures. Pour ceux qui s’accrochent à cette utopie, il va de soi que la République est à même d’intégrer toutes les façons d’être, de penser et de croire.

Mais pour ceux qui croient comme Ernest Renan (1882) qu’une société n’existe que par le « désir de vivre ensemble », « la possession en commun d'un riche legs de souvenirs » et « la volonté de continuer à faire valoir l'héritage qu'on a reçu indivis », la question qui importe est de savoir si l’islam est compatible avec la France, son régime démocratique mais aussi ses mœurs, son art de vivre, sa langue, sa culture, son histoire… en bref son identité.

La faute à l’islam ?

Demandons-nous pourquoi une religion serait incompatible avec l’identité française. Comme tous les pays ouest-européens, la France est née il y a mille ans de la rencontre entre le monde germanique et le monde méditerranéen. De cette rencontre sous l’égide de l’Église sont issus en particulier :
• Le mariage monogamique, indissoluble, fondé sur le libre consentement des époux ; une révolution qui a permis une première émancipation des femmes.
• Le vote par tête dans les abbayes d’une part et d’autre part, le contrôle de l’impôt par des assemblées élues, prémices de la démocratie moderne.
• La stabilité des coutumes, grâce à l’absence d’invasions et d’immigration ; elle est à l’origine de notre système juridique.

Pendant longtemps, ces traits (libération des femmes, démocratie, codes de lois) furent propres à la chrétienté occidentale. La Révolution française en a cependant semé le ferment jusqu’en Russie et même sur les bords du Nil. Mieux encore, Napoléon a rallié les communautés juives d’Europe aux lois de la République (à l’exception, hélas, des communautés juives d’Europe orientale qui, étant restées confinées dans leurs archaïsmes, nourrirent plus tard l’antisémitisme nazi).

Par le décret du 17 mars 1808, l’Empereur accorda aux juifs de l’Empire français et du royaume d’Italie la liberté de se déplacer. Ce fut la fin des ghettos et de tout signe distinctif. Mais les juifs acceptèrent en contrepartie le Code civil. Ils renoncèrent à la polygamie et adoptèrent des prénoms occidentaux. En dépit de la persistance de préjugés antisémites, les juifs allaient ainsi remarquablement s’assimiler. La pratique religieuse leur ayant donné le goût des livres et de l’étude, ils allaient même investir les milieux scientifiques et intellectuels.


Ce résultat n’était pas acquis d’avance. Il y a fallu la détermination d’un véritable homme d’État, Napoléon, soutenu par un peuple droit dans ses bottes. Le judaïsme, en effet, n’avait rien à envier en matière d’archaïsme, à l’islam et au Coran des origines. La Bible hébraïque est tout autant que le Coran tissée de massacres, d’appels à tuer les blasphémateurs, de références à la polygamie et à l’esclavage, sans parler des interdits vestimentaires (voile) et alimentaires (porc, alcool, etc.). À cela rien d’étonnant, le prophète Mahomet ayant été en contact très étroit avec les communautés juives d’Arabie.

C’est aussi la Révolution et Bonaparte qui ont inspiré aux musulmans la volonté de se moderniser, en Égypte d’abord, puis à Constantinople et en Tunisie : Méhémet Ali, le sultan Abdul-Medjid Ier, le bey Mohammed es-Sadok. Dans la première moitié du XXe siècle, le mouvement s’est s’amplifié avec Moustafa Kémal (Turquie), Réza Pahlévi (Iran), Bourguiba (Tunisie), Nasser (Égypte).

Les réformateurs ont accommodé les textes sacrés. Ainsi, le Coran autorise les hommes à épouser quatre femmes mais à condition de les traiter de manière strictement équitable. Le gouvernement tunisien considérant cela impossible (sauf au Prophète), il a interdit la polygamie. Devant ses parlementaires médusés, en plein mois de Ramadan, Bourguiba osa aussi boire un verre d’eau : le Coran dispense du jeûne les croyants qui font le djihad. Or, le combat pour le développement est une forme de djihad. CQFD. Nasser, quant à lui, fit s’esclaffer ses parlementaires en se moquant du voile que les Frères musulmans voulaient imposer aux femmes.

Mais tout a basculé il y a un demi-siècle, dans les années 1970 : la défaite du Vietnam, les crises politiques (Watergate) et économiques (chocs pétroliers) et la libéralisation des mœurs affectèrent le prestige des Occidentaux. Les modernistes arabes furent de leur côté affaiblis par leurs défaites face à Israël. Quant au chah d’Iran, il fut renversé par une révolution socialisante mais aussitôt récupérée par le clergé chiite, jusque-là tenu à l’écart du pouvoir. Enfin, l’intervention armée des Soviétiques au secours du gouvernement communiste d’Afghanistan entraîna un appel à la guerre sainte.

Last but not least, l’Arabie séoudite, liée à un islam sectaire et archaïque, le wahhabisme ou salafisme, bénéficia grâce aux chocs pétroliers d’une soudaine manne financière. Craignant de subir le sort du chah après la prise de la Grande Mosquée de La Mecque, la dynastie séoudienne renforça l’emprise de la religion sur la société et surtout usa de sa richesse pour diffuser le salafisme dans le reste du monde musulman et tout particulièrement dans les diasporas établies en Europe : envoi d’imams et de prédicateurs, construction de mosquées, propagande par les médias les plus modernes…

Il s’ensuit ce qu’un analyste américain, Samuel Huntington, appela en 1993 un Choc des Civilisations, à cela près que les gouvernants sectaires d’Arabie mais aussi du Qatar bénéficièrent d’une bienveillante neutralité de leur allié étasunien, en dépit des attentats du 11 septembre 2001 auxquels ils avaient participé.

Le résultat ne se fit pas attendre. Déçues par le modèle occidental, les jeunes générations musulmanes se laissèrent séduire par l’idéal salafiste, au grand dam de leurs parents. Sous l’emprise des prédicateurs, les jeunes filles s’obligèrent à porter un voile comme seules en portaient autrefois les femmes de la péninsule arabe ou de quelques contrées reculées d’Afghanistan. C’est un peu comme si une secte évangélique intégriste avait subverti à coup de milliards le monde chrétien, investi le Saint-Siège et imposé une vision littérale de la foi et de la Bible… Ou comme si les juifs étaient revenus dans leurs ghettos.

De là, hélas, le sentiment chez beaucoup de Français que l’islam, réduit à sa version salafiste, est décidément incompatible avec la démocratie française et imperméable à la notion de laïcité.

La faute aux Français ?

Le plus troublant est qu’en Occident, une partie de la gauche intellectuelle considère comme fréquentable l’islam du hijab et du couteau. En France, elle dénonce comme « islamophobes » les personnes courageuses qui le combattent, comme Malika Sorel-Sutter (Décomposition française, 2015) ou Lydia Guirous (Allah est grand, la République aussi, 2014) !

La crainte de la stigmatisation et de la mort sociale conduit les citoyens à se taire avec des conséquences parfois dramatiques. C'est ainsi qu'à la préfecture de police de Paris, un employé a pu se radicaliser pendant plusieurs années sans être dénoncé ni sanctionné, chacun craignant d’être taxé de racisme et d’islamophobie. Le 3 octobre 2019, il a égorgé quatre personnes !

Il suffit pourtant de dialoguer à Paris avec un chauffeur de taxi maghrébin ou noir pour mesurer l’ampleur du rejet de l’islamisme chez les travailleurs issus de l’immigration. Leurs mots feraient même frémir d’effroi des leaders comme Marine Le Pen ou Jean-Luc Mélenchon, réputés pour leur franc-parler.

Qu’est-il donc arrivé pour que les citoyens français n’aient plus la volonté de se protéger et protéger leurs concitoyens musulmans contre les violences islamistes ? Crime après crime revient le même rituel : hommage officiel, marche blanche, coup de menton du chef de l’État, nouvelle loi. Et puis rien. Ah si, quelques fortes paroles sur la « déconstruction de l’Histoire de France », la « colonisation, crime contre l’humanité » ou le bel avenir de la « souveraineté européenne ». Quand une nation fait le choix de disparaître, ne nous étonnons pas que la barbarie la remplace. La Nature a horreur du vide.

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