samedi 5 septembre 2020

DISPARITION DE ANNIE CORDY


Annie Cordy, née Léonie Cooreman le 16 juin 1928 à Laeken, est une chanteuse, meneuse de revue et actrice belge. Artiste prolifique, elle a enregistré plus de 700 chansons au style enjoué et festif, joué dans une vingtaine de comédies musicales et d'opérettes, une quarantaine de films, une trentaine de séries et téléfilms, une dizaine de pièces de théâtre, donné près de 10 000 galas. Très énergique et toujours de bonne humeur lors de ses apparitions en public, elle vante les mérites du sourire, même s'il lui arrive d'incarner des rôles plus graves au cinéma ou pour des fictions à la télévision.


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Annie Cordy : « Tata Yoyo » n'est plus

Le 4 juillet 2018, elle avait célébré ses 90 ans en fanfare. Fête sur la grande place de Bruxelles, installation d'une plaque (dans le parc de Laeken) en son honneur et réception au palais royal… La Belgique, son pays natal, lui rendait un hommage appuyé. « C'est rarissime chez nous de donner le nom d'un lieu à une personnalité encore vivante, expliquait alors l'échevine Karine Lalieux (équivalent d'adjointe au maire chargée de la culture, NDLR). Annie Cordy fait partie du quotidien des Belges. Nous voulions la fêter et la rendre immortelle. » Annie Cordy (de son vrai nom Léonie Juliana Cooreman) est décédée ce vendredi. « Elle a fait un malaise vers 18h00. Les pompiers sont arrivés très vite, ont tout tenté pour la ranimer », a déclaré à l'Agence France Presse sa nièce, Michèle Lebon, qui vivait avec elle dans une maison sur les hauteurs de Cannes depuis des années.

Née le 16 juin 1928 dans une famille modeste (son père est menuisier, sa mère épicière), la jeune Annie suit une formation de danseuse à partir de 8 ans, avant d'apprendre le piano. Elle vivote pendant quelques années, chantant dans des cafés-concerts, avant d'intégrer Au bœuf sur le toit, un cabaret fondé par Jean Omer, porte de Namur, en 1938. C'est là qu'elle est repérée par le directeur artistique du Lido, qui lui propose de participer à la revue du célèbre music-hall parisien. Elle n'a que 18 ans. Ce « coup du destin », selon ses propres termes, fait basculer sa vie. En quittant Bruxelles, « Nini la chance », son surnom, change de monde. « Mais je n'ai jamais oublié d'où je viens », répétait-elle souvent.

De Bruxelles à Paris

Annie Cordy ©  Georges Retif de la Bretonne / Photo12
Annie Cordy chez elle en 1956 © Georges Retif de la Bretonne / Photo12

En 1952, Nini Cordy quitte momentanément le registre du music-hall pour tâter de l'opérette. Avec Bourvil et Georges Guétary, elle crée La Route fleurie, une comédie musicale signée Raymond Vincy, sur une musique de Francis Lopez (qui vient de faire un triomphe avec son Chanteur de Mexico). Le succès de cette pièce lui ouvre les portes des théâtres parisiens. Elle jouera ainsi de nombreuses pièces de boulevard, accompagnant sur scène les plus grands comiques, de Louis de Funès à Darry Cowl.

La jeune femme n'en continue pas moins la chanson. Sous contrat avec Pathé-Marconi, elle se produit en duo avec Henri Salvador, alors débutant mais déjà en vogue, et grave à cette époque plusieurs « 45 tours ». Plusieurs de ses chansons deviennent des « tubes » (« Les Trois Bandits de Napoli », « Bonbons Caramels », « Fleur de papillon », « Léon », « La Tantina de Burgos », « La Ballade de Davy Crockett ») qui constitueront la base de son répertoire, où la fantaisie et l'humour occupent une place de choix.

De la scène au cinéma


En 1953, elle est à l'affiche de son premier long-métrage (Boum sur Paris) : un film à sketches où jouent également Charles Boyer et Martine Carol, entre autres. Sacha Guitry lui offre un petit rôle dans Si Versailles m'était conté (en 1954). Ces succès sur grand écran ne la détournent pas pour autant de la scène. Annie Cordy ne laissera jamais tomber la chanson. Son obstination paye. En 1955, elle remporte le grand prix de l'Académie Charles-Cros pour « Oh Bessie ! ».

C'est en interprétant Cri-Cri dans Le Chanteur de Mexico, en 1956, que la jeune Annie Cordy accède au vedettariat. Au fait de sa popularité, la chanteuse joue alors les stakhanovistes, enregistrant quasiment un disque (deux titres) par an. Annie Cordy oriente de plus en plus ses prestations vers la farce. Parmi ses titres cultes figurent « La Bonne du curé » en 1974, « Frida oum Papa » et « Jane la Tarzane » en 1975, « Ça ira mieux demain » en 1977, « Cho Ka Ka O » en 1985 et l'inénarrable « Tata Yoyo » en 1980.

Parallèlement à sa carrière de chanteuse, elle poursuit sa collaboration au cinéma. Là aussi, son registre s'affirme comme étant résolument celui du rire. Après 1959, date de la sortie de Cigarettes, Whisky et p'tites pépées (avec Pierre Mondy), elle ne fera que de (trop) rares incursions dans le domaine tragique. Parmi les 80 films qu'elle aura tournés ne figure qu'une poignée de drames : Le Passager de la pluie (1969), sous la direction de René Clément, Le Chat (1971), réalisé par Pierre Granier-Deferre, aux côtés de Jean Gabin et Simone Signoret, mais aussi Rue Haute (nom d'un quartier de Bruxelles), où elle donne la réplique à Mort Shuman en 1976, et Un été après l'autre en 1989. Elle aura notamment incarné, dans les années 80, Madame SOS, une milliardaire généreuse qui règle, à chaque épisode, les problèmes d'une famille dans le besoin.

Annie Cordy avait rencontré, à 20 ans, François-Henri Bruno, dit « Bruno », de 17 ans son aîné. L'industriel, cousin éloigné des frères Joseph et Louis Clérico, propriétaires du Lido depuis 1946. Nono, comme le surnomme Nini, sera « l'homme de (s)a vie ». Elle l'épouse en 1958, mais ils n'auront pas d'enfants – « Je ne pouvais pas en avoir », expliquait-elle sans dissimuler ses regrets. Menant, comme Line Renaud, une carrière parallèle de meneuse de revue aux États-Unis, de chanteuse et de comédienne en France et en Belgique, Annie Cordy aura donné, dit-on, plus de 10 000 galas pendant sa carrière. Anoblie par le roi des Belges Albert II en 2004, la baronne Annie Cordy avait pris pour devise « La passion fait la force ». On ne saurait mieux dire.

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