mercredi 5 décembre 2018

LA PRESSE ETRANGERE ET LES GILETS JAUNES

Les Gilets jaunes : la presse étrangère accable Emmanuel Macron


Différents titres internationaux pointent « plusieurs erreurs » d’un chef de l’Etat incapable de se réconcilier avec « la France du diesel ».

« Les Français ont l’impression d’être pris pour des imbéciles. A juste titre. » Cette citation n’est pas extraite d’un tract de l’opposition politique, ni d’une pancarte de propagande révolutionnaire. Elle provient d’un article de Die Welt, journal conservateur établi en Allemagne, où il est l’un des trois quotidiens les plus vendus.
A l’image de ce genre de Figaro d’outre-Rhin, la presse étrangère n’épargne pas Emmanuel Macron à l’heure d’analyser le mouvement de ces Gilets jaunes qui bloquent les routes françaises depuis samedi, et menacent de s’en prendre à Paris ce week-end.
Die Welt estime ainsi que « le gouvernement a commis plusieurs grosses erreurs », notamment « en justifiant l’augmentation des taxes par la seule protection de l’environnement, bien que la majeure partie des recettes serve un objectif différent. »
Dans cette fronde « différente du folklore protestataire habituel » en France - « cette fois, il ne s’agit pas de défendre des privilèges ou des acquis sociaux », relève-t-il,- le journal allemand voit « le symptôme d’une rupture » entre « la classe dirigeante » et des citoyens dont elle est « toujours plus éloignée ».
Le spectre de la « brioche » de Marie-Antoinette
Autre journal phare outre-Rhin, le Süddeutsche Zeitung use de la même rhétorique, évoquant « la rébellion d’une classe moyenne qui se sent marginalisée socialement et géographiquement par les personnes les mieux rémunérées des grandes villes ». Et n’est pas plus tendre avec le chef de l’Etat.« Pour la plupart des Français, sa politique n’a jusqu’à présent apporté aucune amélioration notable », relève-t-il. Et de dresser un constat mi-amusé, mi-sérieux, avec la Révolution. La colère, dit-il, « était née du prix du pain ». Après quoi il est de bon ton de prétendre que Marie-Antoinette aurait conseillé aux démunis de manger « de la brioche ». « Aujourd’hui, le coût des carburants alimente la colère, et Macron recommande aux automobilistes d’acheter des voitures électriques propres », raille le quotidien munichois.
« Un nouvel aristocrate »
En Italie, le Corriere Della Sera, qui admet voir en l’écologie « l’une des plus nobles batailles » du président de la République, estime que la fronde populaire a « des causes plus profondes qu’une prétendue insensibilité écologique » des Français.
« Le président Macron, étranger aux partis politiques et néophyte, a été élu en partie grâce à une révolte contre les élites, ponte-t-il. Maintenant qu’il est à l’Élysée, il est perçu comme un nouvel aristocrate, éloigné des problèmes de la population commune. »
La France du diesel
Et de rappeler que « les catégories sociales impliquées sont les plus défavorisées sur le plan économique […] et les plus pénalisées par un système de transport en commun qui, quel que soit son degré d’efficacité et d’importance, implique toujours des millions de trajets quotidiens par la route. »
El Mundo, le quotidien espagnol, oppose également « la France du diesel » au chef de l’Etat, voyant dans les Gilets jaunes « la plus grande expression de rejet à laquelle Emmanuel Macron a dû faire face jusqu’à présent ». Et décrit « un mouvement périphérique dans tous les sens du terme », « géographique », « social » et « économique ». « Quoi de plus approprié qu’un objet servant à devenir visible en cas d’urgence pour identifier les personnes qui se sentent oubliées du gouvernement ? », souligne-t-il.
Mea culpa
Plus distante du mouvement, la presse anglophone retient surtout l’incapacité du président à « rétablir la confiance dans la démocratie parmi ceux qui se sentaient désabusés et détachés de la politique », à l’instar de la BBC. Le Financial Times évoque d’ailleurs un Emmanuel Macron reconnaissant, le 14 novembre, n’avoir « pas réussi à réconcilier le peuple français avec ses dirigeants ». Un « mea culpa » qualifié de « rare moment d’humilité » du locataire de l’Elysée.

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